Selon la méthode d'anticipation politique, la datation des ruptures s'effectue en identifiant les périodes à haut risque lors desquelles la moindre étincelle vient mettre le feu aux poudres.
La période actuelle est un exemple typique où se conjuguent un nombre impressionnant de facteurs explosifs :
nouvelles bulles financières gonflées par les injections massives d'argent public, instabilité géopolitique mondiale,guerre des monnaies, début de guerre politique contre le "terrorisme
financier", crise politique en Europe, chômage de masse et économie réelle dégradée, sans compter bien sûr l'endettement public qui atteint des sommets.
C'est une telle coïncidence de facteurs qu'il relève du miracle que cette situation perdure. Les Etats-Unis sont sous respiration artificielle grâce à la générosité démesurée de la FED. Cet
aspect de la situation des banques centrales a franchi un nouveau stade avec la politique de la Banque du Japon qui cette fois, loin de réduire le niveau de risque, l'amplifie au contraire, et
est un exemplaire de la fuite en avant qui sert aujourd'hui de politique à certains pays démunis de solution (Japon, Etats-Unis, Royaume-Uni)
Un nouveau pas dans l'instabilité du système a été franchi. Quelques notes discordantes viennent en outre percer le silence assourdissant imposé jalousement par le monde financier sur la
situation réelle, comme la soudaine dégradation "surprise" de tous les indicateurs macro-économiques censés pourtant refléter la "reprise" :
emploi aux Etats-Unis, au Canada et en Australie, indices de confiance, ventes d'ordinateurs et de téléphones mobiles, exportations chinoises, ventes de voitures dans les BRICS etc..
La crise chypriote est également une bonne piqûre de rappel. Les remous générés par cette île minuscule, pourtant hors le coeur financier mondial qu'est la zone dollar, laissent augurer ce qu'il
adviendra quand lâchera un noeud central du système..! Car petit à petit l'Europe panse laborieusement ses plaies, au contraire la "zone US" s'enferre toujours plus dans les méthodes responsables
de la crise, comme si choisir un plongeoir plus élevé au-dessus d'une piscine sans eau allait rendre le choc moins douloureux.
LA CRISE au CARRE, ou LA FUITE en AVANT comme "POLITIQUE"
"Bâtir une nouvelle crise sur la crise existante" semble être le but des politiques au Japon, au Royaume-uni et aux Etats-Unis. A l'image de ces produits financiers qui ont explosé en vol en
2008, les "CDO au carré" qui sont des constructions complexes sur des constructions complexes (CDO sur des CDO) visant à diluer le risque mais qui en réalité l'exacerbent, la fuite en avant menée
dans ces pays construit une sorte de "crise au carré", une nouvelle crise sur la crise de 2008. Ils prétendent éteindre l'incendie en l'arrosant, sans s'apercevoir que ce n'est pa de l'eau qu'ils
utilisent mais de l'essence..!
Ainsi la Banque du Japon qui dévoile son plan de rachat de dette japonaise à faire pâlir de jalousie Ben Bernanke et son QE. Si ce n'était le Japon qui a connu un passé douloureux sur la
question, on dirait que l'arme atomique a été dégainée et que les risques de dérapage sont immenses, avec des conséquences à la hauteur de la puissance de feu. En effet, l'énorme dette japonaise
était jusqu'à présent soutenable car les intérêts des bons du trésor étaient très faibles, de l'ordre de 0,5%. Les investisseurs, principalement les institutions nationales, acceptaient ces
rendements car l'inflation était négative, de l'ordre de 0,5%, faisant monter le rendement réel à 1% environ. Or avec un objectif d'inflation maintenant de 2% et une banque centrale déterminée à
doubler la quantité de monnaie en circulation, le taux des bons du trésor devra monter autour de 3% pour laisser aux investisseurs un rendement réel de 1%.
Sur une dette dépassant 200% du PIB, ce taux est insoutenable car le service de la dette représente déjà 40% des recettes publiques aux taux actuel.
Le marché en a bien conscience comme en témoignent les quatre suspensions temporaires, eu quatre jours, du marché des bons du trésor japonais à cause de trop fortes fluctuations. C'est un
avertissement clair du risque de dévissage incontrôlé.
Le Japon est donc dans une impasse !
BULLES à TOUS les ETAGES
La même stratégie est expérimentée depuis le début de la crise par les Etats-Unis. Ce maintient au forceps de l'illusion d'une économie réelle bien portante alimente des bulles un peu partout.
Que ce soit la bulle des prêts étudiants, celle des prêts automobiles, bien sûr la bulle des bons du trésor, ou encore une nouvelle bulle de type subprimes en formation à la demande d'Obama qui
incite maintenant les banques à prêter aux ménages les moins sûrs afin de relancer l'immobilier, tous ces pans de l'économie ne tiennent que grâce à al FED et sont déconnectés de la
réalité...mais en paraphrasant une réplique de film, l'important ce n'est pas la bulle, c'est l'atterrissage.
Or ce problème ne se contente pas de rester à l'intérieur des frontières US, il a contribue en effet à nourrir également une "bulle des émergents" qui a fait long feu et commence à se réduire,
empêchant d'espérer que l'économie mondiale soit réellement tirée par les pays émergents en 2013. Le Canada est bien mal en point lui aussi avec une énorme bulle immobilière, des statistiques de
l'emploi qui déçoivent, etc..
La bulle ultime c'est le dollar. Toute la suprématie des Etats-Unsi repose sur la domination du dollar, et toute leur politique étrangère a pour but de préserver à tout prix cette domination.
Or ils n'en ont plus la possibilité..!
Le rôle du dollar s'amenuise de toutes parts : à coup d'accords swap ou de commerce hors dollar, à coup de perte de confiance y compris aux Etats-Unis où la politique inflationniste de la FEd a
conduit plusieurs Etats à autoriser l'OR comme monnaie ou du moins l'envisager, a coup de sortie progressive de la Chine du marché des bons du trésor US etc.. La bulle Bitcoin illustre encore
cette défiance dans le dollar ..les expériences de monnaies alternatives sont à l'ordre du jour en 2013. Deux logiques différentes poussent ces expérimentations, la première étant la perte de
confiance dans la monnaie officielle.
Une zone dollar qui se réduit comme une peau de chagrin et une FED qui au contraire imprime de plus en plus de monnaie entraînent une surabondance de dollars dont la conséquence est l'éclatement
de la bulle dollar. En comparaison, les autres économies ne dépendent pas du statut international de leur monnaie, et au contraire celle-ci ne peuvent que prendre de l'importance si elle
s'internationalise.
Afin de prolonger la suprématie du dollar, outre leurs moyens habituels de moins en moins efficaces utilisant le pétrole et leur puissance militaire, les Etats-Unis cherchent à créer à tout va
des zones de libre-échange. Ce thème des zones de libre-échange est bel et bien au menu de 2013..toutefois la plupart risque de rester des coquilles vides permettant de déguiser un nouveau
protectionnisme : c'est exactement ce qui se passe avec les négociations entre l'Europe et les Etats-Unis qui cristallisent le mécontentement populaire et n'aboutiront pas tout simplement car les
européens ne veulent pas des produits américains (et inversement).
Bref, le salut du dollar ne viendra pas du côté des traités de libre-échange..!
extrait de LEAP/2020
http://millesime.over-blog.com